1er juin- La clocharde du vendredi

Qu’est-ce que tu fous là juste le vendredi
Y aurait-il chaque jeudi
Une teuf de clodos dans le quartier
Accordéons percés et violons à trois cordes
Qui te jetterait ici dans les vapeurs de l’aube ?
T’as faim, je n’y peux rien
Te donner à bouffer et demain
Tu diras, c'est parfait j’ai bien mangé hier ?
Relève-toi, t’es pas une limace

Suintant de mansuétude
Aux pieds des autres, tu rampes la main tendue
Avec ton regard de chat pris en flag
Où sont ton père, ta mère et ton dernier amour ?
Tiens, un pain au lait, que faire de plus?

Ne touche pas ma main, elle n'est pas à toi
Tu n’es rien ni personne, quelqu’un t’a éventrée
Laissée-là; toi laisse-moi, rebrousse mes chemins
Ramasse ton sourire édenté, te casse pas la fierté, va
Et deviens folle au moins, qu’on puisse te pardonner
Tu connais Izzo, il a écrit sur toi, tu connais Izzo, il a écrit la mer?
Tu connais la mer ?
De douche t’en prendras pas, tu pues et c'est ton lot

Jeudi prochain laisse ta fête de clodos
Sur le bout de trottoir râpé, je t’apporterai une bouteille
Montepulciano d’Abruzzo
Les fruits âpres, prodigues et rocailleux

Bouquet de fleurs sur des montagnes qui hissent haut l’esprit
Derrière leurs flancs, je te conterai la mer
Et puisque tu ne la connais pas
Je te ferai un mezze, mer et océan, huile et tourments
Tu te videras la tête et la laissera s’emplir
Du rouleau de la vague qui vient lécher tes tempes
Ou de celle de la lame qui vient défier la roche

Larme lame lampe, une lettre et tout bascule
Sens-tu déjà les encoches de tes yeux se truffer
Du vert, du bleu, du violet mordorés

Et ton corps inspirer les courants du voyage ?
Le sable a la croûte du gâteau que tu aimais enfant
Sous le poids de tes mains flanche et craque
Combien de temps dis-moi
Que t’as pas fait craquer un homme ?
Pourtant je vois bien que tu fus belle

Tes yeux le disent encore
Va, dérive, la plage t'accueille

Allonge-toi et trouve l’adhésion au grain près
Alors tu vois, que tu fermes les yeux
Ou les gardes ouverts, partout y a que du bleu
Et dans le fracas des vagues, les alvéoles du sable
Dans l’écrémé d’écume, tu peux hurler ou murmurer
Et tout laisser partir vers de lointains rivages

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