13 mars- MerKiiii

A Nora, Gaël, Nadège, Alfred, Cécile, Martin, Wahed, Olivier, Romain, Corentin (liste susceptible d'être allongée).
En amitié je n'ai, grâce à vous, à chacun, pour des raisons différentes, jamais besoin des retours en arrière!

On ne relève pas les fantômes du passé. Si l’envie nous en prend, c’est le présent qu’il faut interroger : on ne se retourne que lorsqu’on ne voit plus le chemin devant. Mieux vaut alors lire les histoires des autres. Les absents sont absents voilà tout, les mots sont la réalité. Petit poucet…retournez-vous et vous rencontrerez l’ogre. La mode est à la résurrection des amis perdus et des anges déchus pour meubler. Mais on a rien à se dire, au nom de quoi d’ailleurs?, plus de moments partagés et ils ont souvent bien changé. Une fois j’ai retrouvé quelqu’un, le même que dix années auparavant : à son contact j’ai recouvré mon intégrité, découvert avoir conservé quelque chose de droit, de pur. Quelque chose d’infime comme une raison de continuer. Mais à se délecter du passé lorsqu’on craint l’avenir ou qu’on est ombre au présent, on risque bien d’oublier de vivre. Les figures parties ont toujours des allures de héros de romans et on réécrit: écrivons plutôt!


Et pourtant. Néanmoins. Toutefois. Quinze ans plus tard je voudrais en retrouver. Pas pour savoir ce qu’ils sont devenus, ni pour dire « eh, reviens, y a de la place ». Pour pouvoir dire à quelques amis de classe, « eh, copain, tu m’as bien manqué » : pas toi, pas vraiment « tu » en fait… nous. Je connais leurs noms. Savoir seulement peut-être s’ils sont toujours là, vivant quelque part, s’ils ont tenu le coup, s’ils sont heureux. Je pense souvent à eux.

Et il en est d’autres que j’aimerais retrouver pour dire merci. Pas forcément retrouver véritablement : au téléphone, dans un mail, dans une lettre… dire tu as compté… finalement. Pour dire dans ce que je suis là il y a un peu de toi tu ne le sais pas je te le dis alors merci. Les années estompent l’expérience, le suc seul demeure. Dans l’intensité, non dans le temps, se jouent les instants perles de l’existence. Une attention, un regard, un sourire, une lettre. La vie vaut pour ses hasards en poésie qui ramènent soudain de loin une flagrance oubliée. Une note, quelqu’un, une lumière, un moment, un regard, une grosse pluie, un mot d’esprit, de l’âme ou du cœur. Il en est qu’on n’oublie pas. Ce soir je me souviens de l’Irlande, sous mes paupières ma grande Bretagne, et je sais que dans le village je retrouverais ta porte. Si je frappais et que ta mère ouvrait je n’aurais rien à dire sauf dites-lui merci… finalement… En anglais.

Morale : vous la connaissez mais je voudrais prendre la peine de m’en assurer. Les relations essentielles sont comme le grand vin. Il faut leur laisser le temps de mûrir, de prendre de la bouteille, des zones d’ombre, avant d’en explorer tous les parfums. Et parce qu’il est nettement plus onéreux de se procurer aujourd’hui une bouteille vieille de quinze ans, mieux vaut parier sur l’avenir, le voir et investir dès maintenant sur un crû prometteur (moyennant un peu de flair et quelques erreurs qu’on ne répètera plus). Tellement plus simple de vous dire au présent vous comptez tant… merci! Chaque jour je goûte la saveur de votre présence, la ravive en votre absence et c’est ainsi que, ensemble, dans quinze ans, nous ouvrirons la bouteille.

Zêtezémus?

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