8 août- Hantise

Chaque jour, à trop de secondes, hantent les mots et les rythmes des poètes. Passent les jours, sonne l'heure; passent les jours, sonne l'heure; passent les jours, sonne l'heure! Entêtant. Empêchent de penser, encombrent l'écriture. Dans le futur, j'inventerai une opération chirurgicale consistant à délester l'esprit des vers qui le rongent.


Tu es pressé d’écrire/ Comme si tu étais en retard sur la vie
Mais oui, la peau plisse, plie, ploie. Et rompra
Le temps passe, je ne l’attrape pas, le jour décroît, la nuit augmente, je n’entre ni n’encre. Radeau.
Peut-être écrire non, plutôt ne rien faire. Rien. Rien existe. Mais comme il ne faut pas insulter au Néant, mieux vaut alors marcher.
Les pas perdus entraînent au Panthéon : ironie, sur Racine une corneille est perchée, en son bec un fromage. A mon oeil j'accroche l'image sans la réfléchir pour ne pas m'égarer dans la nuit du sens.
Le long des quais, les arbres dégorgent de vert et l’air est parfois si doux qu’on ferme la paupière. Prendre garde à ne pas tomber ni à s’assoupir, jamais je n'oublierai Le Dormeur du Val.
Sur le chemin du retour, vers où qu'importe, la Seine s’étoile de soleil, et sur la rambarde du pont, passent les jours, sonne l’heure. Encore. Ne pas s'abîmer dans la contemplation du passé en flots ou alors accepter de devenir poisson soluble.
Je déambule, erre, martèle les cloisons de mon âme, te parle à toi, toi que je ne connaissais pas, toi qui ne me connaissais pas, et qui n’es jamais là, sauras-tu jamais ce qui me traverse ?
A mesure du périple, Paris devient capitale de la douleur, se transforme en voûte de dédales sombres, et mon luth constellé porte le soleil noir…
J’ai beau m’y apprêter chaque jour, à l’ombre de mes fleurs, me dire qu’on va s’y faire, qu'il n'y a pas de raison, de raison c'est vrai que je n'en connais point, il faut poursuivre la route sans jamais alourdir mes pensées du poids de mes souliers. Dans la rue harponner les yeux des autres, tendre un filin et boire cet alcool brûlant comme la vie. Ici, maintenant, dans la seconde palpitante, tenter d'émerger car je veux voir mon rêve en sa réalité et jusqu’à mon repos, tout est un combat
Suis-je proie ou bourreau, à qui donc sommes-nous ? Qu’importe les questions, je ne suis guère inquiète : l’existence est ailleurs.

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