27 septembre-Inventaire

Ainsi c'est chez toi que se cache ma mémoire en objets
La boîte à sel de Nénène et son ventilateur
Les lampes dijonnaises
La planche à découper de mes parents
Le tapis de bain, la couverture de laine
Dans ta cuisine, l'odeur du placard est tunisienne
Ainsi lorsqu'on perd la mémoire
Suffirait de se demander
Mais où l'ai-je donc laissée?
Encore faut-il vouloir la raviver
L'histoire demeure dans les objets
Et dans tes choix imperceptibles
Le savon que tu utilises
Le type de café
Ou le poulet en sauce

Ce matin j'ai manqué de crier

Car tu n'étais plus là
Une seule nuit suffit
La mémoire revient vite
Et l'habitude aussi
Car voilà bien des nuits
Que tu n'es plus là
Que mon lit est à moi
La raison revient vite
Qui me souffle à l'oreille
Qu'on ne rappelle pas
Quelqu'un qu'on a laissé

26 septembre- Itinéraire parisien

Aujourd’hui, je vais vous parler de mon trajet quotidien et ça va être passionnant. Montez derrière moi, le nez au vent, cramponnez-vous à moi...
Pour me rendre au travail, je traverse trois galaxies et chaque matin je me dis, c'est loooooin... alors attention, essayez de visualiser.
Première galaxie, boulevard Voltaire, République, Rue de Turbigo. Dans cette galaxie, je navigue aisément car le boulevard Voltaire je le connais bien, l’emprunte à toute saison, à toute heure de la journée ou de la nuit. Le matin, le boulevard Voltaire ressemble à la prose de son auteur : automobilistes un peu agressifs mais en file indienne aisément contournable, l’église Saint-Ambroise m’arrête chaque fois à son feu; au départ le boulevard paraît long et encombré, mais en fait on l’enfile facilement, un petit coup de roue à gauche, un autre à droite en pied de nez. A République, c’est le tourniquet mais j'ai la priorité. A partir d’Arts et Métiers, ça commence à se corser, mais rien de neuf : du monde, des cafés, des boulangeries, des gens qui traversent, je suis toujours chez moi, dans ma galaxie. C’est alors qu’arrive… le tunnel des Halles. Ce tunnel, c'est une métaphore alambiquée et glissante. Passage d’une galaxie à l’autre. Souvenirs de l’avoir traversé tant de fois avec Cédric: je l’aimais bien alors parce que je n’avais pas peur, parce que lorsqu’il pleuvait ou faisait froid, ce tunnel c’était l’accalmie. Aujourd’hui, ce tunnel c’est pour moi quatre virages casse-gueule, mes mains qui se crispent sur les poignées du scooter dès que j’y entre. Lorsqu’il pleut, je me souviens de Cédric m'expliquant la dangerosité de ce tunnel en chaussée mouillée. Il ne faut pas m'expliquer parce que je risque alors de comprendre, de prendre conscience et donc... d'avoir peur. Dans le même temps, ce tunnel je l’aime car il réchauffe toujours et, passé le quatrième virage, s’amorce une grande montée à grimper à toute vitesse pour déboucher sur…. la seconde galaxie.

Dans cette galaxie, des mois durant, il était toujours la même heure. Invariablement et jusqu'à cette rentrée (cf. blog du 2 septembre), l’horloge du Pont Neuf indiquait trois heures moins vingt : du soir, du matin ? mystère… Peut-être l'horloge s'est-elle arrêtée en même temps que La Samaritaine? Dans cette galaxie, on entre sur des pavés, on traverse un pont et c’est beau, c’est un voyage. Le soleil se lève sur Notre-Dame. Le Pont Neuf est moment de répit avant la bataille rangée du Quai Conti puis du Quai Voltaire. Plus de boutiques, plus de passants, plus de gens, seulement des automobilistes, pressés, énervés, c’est la guerre ! Ca déboîte, ça klaxonne, ça s’énerve, ça pique des coups d’accélérateur ; il y a des voitures, des vélos, des scooters, des policiers, des bus, des cars de militaires, le camion des pompiers : c’est l’anarchie sociale. Tout rentre dans l’ordre lorsque se profile l’entrée des voies sur berge Rive Gauche, hop, on s’engage, on se suit, on longe la Seine, bleue, verte, scintillante ou grise. Les péniches sommeillent, les bateaux de cargaison remontent le cours paresseusement, pas très bien réveillés. Passer le pont de la Concorde, apercevoir la coque en libellule du Grand Palais, puis s’impose le Pont Alexandre III, ses deux femmes qui regardent couler l’eau, passer les bateaux, les heures et le temps, le vert de la rambarde, rehaussé de dorures. Je sors là. Traverse le pont. Troisième galaxie.

Dans cette galaxie, on voit la Tour Eiffel, éclatante, le nez embrumé ou dans les nuages, des hommes en smoking ou en costumes cravate, peu de Vélib, des femmes sauterelle Cacharel. On a quitté Voltaire, on flirte avec Montaigne, Marboeuf, Marot mais loin de la littérature, j’emprunte le Cours Albert Ier. Le mercredi c’est marché, c’est le bazar. Un bazar soigneusement rangé tout de même, où même les effluves d’épices et de nourriture arrivent un à un, ordonnée et non en bouquet. Avenue du Président Wilson, premier tronçon, RAS si ce n’est je ne sais quel bâtiment musée cerclé d’un parc qui exhale parfois ses odeurs d’herbe coupée, de fleurs ou de feuilles mouillées. Arrivée place d’Iéna, voitures de maître, diplomates, la rue de Lubeck à droite, que j’ai tant cherchée et où on attend beaucoup, longtemps, l'été souvent. Depuis quelques jours, des hommes élaguent buissons et arbres autour du Conseil Economique et Social, et brûlent les feuilles et les branches. Au feu, odeur de bois : normal… ça sent l’automne, premiers remugles de l’hiver et des cheminées. Second tronçon de l’avenue, un bonheur. Fluide, toujours, je file. Les arbres ici sont ma jauge à saison. Je les vois verdir à mesure, puis jaunir, brunir, s’effeuiller. Dans la perspective ce matin, la moitié a perdu ses feuilles, l’autre arbore fièrement un brun rouge flamboyant. Entre la place du Trocadéro et le second tronçon de l’avenue Wilson, un feu en lutte personnelle avec moi. Chaque matin je me dis que je vais l’avoir, je l’ai souvent au vert et lorsque je le vois au loin, je me dis s’il est rouge alors aujourd’hui il se passera ceci, s’il est vert… etc. Bref, à ce feu précisément se joue la radiosité de mon avenir. Je le passe, débouche place du Trocadéro, poussez-vous tous, j’ai la priorité et je suis arrivée. Et en retard aussi.

Voilà, une autre fois, récit de mon trajet passé en deux galaxies : XIIIe arrondissement-Montparnasse/ Invalides-Troca et d’un itinéraire bis en je ne sais combien de galaxies : Bastille-Concorde-Troca. Et puis il y a les possibilités de trajets retour en fonction des humeurs: Troca-Haussmann-Répu-Voltaire ou bien Troca-Assemblée nNtionale-Saint-Germain-Bastille ou encore Troca-Quais-Louvre-Gare de Lyon! Que d'aventures à venir...vertigineux...

25 septembre- Mon ptit gars

C’est ainsi
La terre est ronde
Faut tourner
Comme tout le monde
Epier le point de gravité
On a des idées
Qu’ont pris l’eau
Et des rêves délavés
Alors partons en quête
Du point de légèreté

C’est ainsi
Faut reléguer les mots
Et puis les idéaux
Savoir ôter
La maille du héros
On est comme tout le monde
Ombres fumées en quête
D’amour et de tendresse

Tu peux bien
Te draper de formules
Dériver au fil de conversations fleuves
Ou te river de principes
C’est l’origine du monde
On est comme tout le monde
Ombres fumées en quête
De l'âme sœur
Du frère d'âme
Creuset où s'enlacent
L'amour du père
La tendresse de la mère
Puiser au creux des mains
La légitimité
D'être planté là


On regarde la vie passer
En tourniquet
On a trente ans maintenant
On pourrait l’attraper
Ou se hisser dessus
Et chaque nuit rêver
D’échappées cavalcades
Mais on la laisse filer
Et dans nos yeux de lune
Amassons les espoirs
Lucioles de nos regards

C’est pas parce qu’on a lu
Qu’on croit avoir compris
Qu’on croit avoir touché
Ce que d’autres ne voient pas
Qu’on croit avoir vécu
Ce que d’autres ne vivent pas
Que l’on est délesté du poids
De la quête des ombres
Celle de tout le monde

Déposons les idées
Et toutes les idées eaux
Les rêves en cerceaux
Trop larges pour nos hanches
Il est temps de hisser
Le croissant de lune
En pleine journée
Et la nuit plein soleil
Sous un ciel jaune de miel
Se pelotonner en position fœtale
S’abreuver de chaleur
Et ta main dans la mienne
Faire la ronde de la terre
Relier le commencement
Avec la fin du monde

24 septembre- Clore

Clore les chapitres
Tourner les pages
Du livre d’images
J’espère le moment
De répit où l’on cesse
D’haranguer les sommets
Le moment où
Pics adoucis
Aspérités colmatées
Ne plus porter, soulever
Et se laisser aller
A...

22 septembre- Pour Gaël

Comme au tarot
Appeler pour vaincre à deux
Contre trois
Appeler pour être épaulé
J’appelle… Gaël
Et un souvenir précis
Fleure bon dans ma mémoire
Le jardin du Pharo
Un crépuscule festonné de rouge coton
Le jardin éclatant de verts
Au creux du premier souffle frais
Nous nous asseyons

Sur la rambarde
Surplombons la mer
Bateaux et paquebots arrivent ou quittent
Pas un bruit seule l’hirondelle du soir
C’est la sérénité
Et le lendemain
Chaleur en plomb
Les îles du Frioul
Tout est simple si facile
L’eau forte de bleu
Exhale sa fraîcheur
Le plaisir d’être ensemble

La roue a tourné depuis
Comme un mauvais diable
Gouvernail du bateau
Te voici deux me voici une
Toujours trois finalement
Tout reste simple et facile
Le jardin du Pharo
Les îles du Frioul
C’est ici à Paris
Lorsque jamais tu ne penses
A ma place
Que tu ne m’ôtes pas les mots
De la bouche
Que tu es là
Je n’avance ni ne recule
Et sur l’instant rambarde
Me pose
C’est la sérénité

21 septembre- Je suis Parker

Rangées les affaires d’été
Avenue Georges V les feuilles sont ocres ou tombées
L’air s’est gorgé des premiers relents de l’hiver
Le matin en scooter j’enfile mes gants
Ils sont fins, de demi-saison
Et j’ai chaque fois le sentiment
De partir commettre un crime
Si les hommes en escargots
Portent leur univers sur le dos
Le fusil à lunette sur l’épaule
Je suis Parker des romans de Richard Stark
Voilà comment un simple gant
Transforme Paris en Californie
La Tour Eiffel en building où se terrer
Et la femme que je suis
En tueuse redoutable
A ne point offenser

20 septembre- Considérations sans intérêt

J’ai deux amours, les Mac et les scooters. Lorsque j’ai envie de parler mac, de déballer mes rêves sur un tapis rouge, j’appelle Igor et ça peut durer des heures : et t’as vu la clé wifi pour relier avec ta chaîne, oui, mais elle marche que un an, va sur le forum Macbidouille, tu verras, ah mince mais elle tourne sur quel port ? et le dernier 20 pouces brossé alu, clavier fin comme la feuille, il dépote pas mal, ouais faudra passer à l’Apple Expo (le paradis sur terre 3 jours durant tous les deux ans), ils auront des promos intéressantes parce que le 20 pouces il est mortel mais seulement 512 de mémoire vive, faut le booster, par contre l’écran il est sublime (oui, oui, carrément!), je me demande si je vais pas le prendre parce qu’il a une résolution de xxx pixels sur tant de pixels et que donc il vaut mieux que n’importe quel écran Samsung et si en plus tu le relies via bluetooth, et la prochaine fois que je te voie faut absolument que je t’installe tel logiciel…. C’est passionnant, vertigineux de possibilités et ce qui est bien c’est qu’on n’achète jamais rien. Enfin, surtout moi.

Second amour, les scooters,: je suis très prolixe, ce qui donne des conversations du type : oui, mais le problème du Looxor de Peugeot c’est qu’il a le réservoir sous la selle, avec capacité de 5 litres seulement, le souci avec le X8 à injection c’est qu’il est en début de vente avec défaut de confection et qu’il faut attendre la suivante, le BMW avec habitacle, faut pas déconner, il coûte 6000 euros, le Honda machin il a des roues qui glissent sur les bandes blanches, Piaggio est cher à l’achat et je te raconte pas le prix des pièces et de la main d’œuvre, etc. Je vais sur les forum, lis les comparatifs géniaux de Auto-Mag, suis les cotes de l’Argus, bref… J’ai remarqué que ce genre de conversations s’avèrent d’autant plus intéressantes et alimentées si mon interlocuteur est un garçon. Je regarde, observe, en matière de scooters j’ai l’œil aiguisé et tous les matins je scrute ceux de mes compagnons de route. Evidemment, seuls les 125 cm3 m’intéressent car les autres, 50 cm3 et mobylettes, ce sont des scooters de stroumphes. Je jette un œil à l’état général, à l’assise conducteur puis passager (car il y a plusieurs sortes d’assises), éventuellement au compteur kilométrique et jauge la capacité de démarrage au feu, la reprise, la tenue de route dans les virages du tunnel des Halles. Pourquoi je raconte tout ça ? Oui, pourquoi…. ? Simplement parce que ce matin, en regardant les scooters, je me suis dit que certains hommes portent, comme les escargots, leur monde sur le dos. Là une guitare, ici une raquette de tennis, à droite un tube à dessin, à gauche un chien dans le sac, et devant moi, il en est un qui roule avec une fille accrochée dans le dos.

18 septembre- L'abordage

La terre tourne
Moi dessus
Toi aussi
Je chancelle
Les mots déboulent
Font des rondes
Dans mon esprit nacelle
Les hanches de gauche à droite
Culbutent sur des amas d'histoire
Conglomérats de cervelle
C'est le bateau ivre
A l'étendard noir
Consonnes contre voyelles
En l'âme la queue du chat
Rejoint le mors des yeux
Salivent dégoulinent
Coulent de l'eau au moulin
La cire de la chandelle chiche
Je tangue
Quête en derviche
L'expiration coulée de plomb fondu
Scelle le pli des lèvres
D'une main cherche la tienne
Chavire

17 septembre- Mes deux pieds

Mes pieds se sont déclaré la guerre
Le gauche se pose au sol
Placide y adhère
La peau lisse et ferme
A peine compulsée
D’infimes lignes de vie
Les ongles forts arrondis
Le droit crevassé, blessé
Des lignes de vie infimes
En chemin de vieillesse
S’effeuille perd peau
Et force dans la kératine
Hésite à toucher le sol
Il a mal et se fend
L’autre lui dit
Tu fais tout pour te rendre intéressant
Qu’on s’occupe de toi, qu’on te bichonne
T’es qu’un veule rebelle
Résultat t’es pas beau
Et tu dépares l’ensemble
L’autre lui répond
Je suis fatigué
Marcher, marcher
Sans s’interroger
J’ai le droit de dire « assez »
De m’assécher et d’exiger
Crèmes, soins et massages
Suis peut-être laid pour l’instant
Mais ça ne durera qu’un temps
Je repartirai ensuite vaillant
Tandis que toi tu ne dis rien
Fais ton fier, ton preux
Mais lorsqu’une crampe te saisit
Tu nous fous par terre
Handicape tout le monde
On ne peut plus rien faire
Ainsi disputent-ils
Drapés dans leurs souliers
Et je ne sais plus très bien
S’ils sont deux
S’il sont un
Si l’un fait marcher l’autre
Ou bien si c’est moi

14 septembre- La chouette

Elle a des yeux immenses
Deux points d’interrogation
Une tête compas qui sonde
La circonférence du monde
Un bec pointu
Aiguillonne les cœurs
Des plumes soyeuses
Blanches, brunes, tachetées
Piquent vers le centre de la terre
Stoïque sur une branche dissimulée
Hulule pour adoucir la nuit
Lui donner la parole
La chouette apporte son courrier
A Harry et à tous les p'tits sorciers
Frappe les pièces d'Athènes
Et des ailes frôle
Les pièces désertes de l'âme
Est l’emblème d’une ville
Où l’effleurer réalise un vœu
Et moi, j’aimerais bien
Une chouette sur mon épaule

7 septembre- A Paris

La rue a été désertée, un vilain crachin pique le visage, le ciel s’assombrit, s’avance la nuit. Un homme marche. Attaché-case à la main, costume marron clair, cravate, cheveux blonds courts, petite quarantaine. Sort du travail, rentre chez lui, cela se sent, se sait, et il regarde ses pieds comme s’ils allaient le conduire vers un ailleurs insoupçonnable. Longe les grilles du parc, lève le nez, ralentit, hésite, s’arrête. Dépose l’attaché-case sur le trottoir mouillé, glisse sa main entre les grilles. Du bout des doigts, il attrape la tige d’une plante et, délicatement lui fait traverser la grille, l’enroule autour des barreaux d’acier. Sans la briser ni même froisser le bourgeon. Lui offre un tuteur pour qu’elle ne tombe pas, qu’elle s’élève fièrement. Puis reprend l’attaché-case, de la main droite caresse le bourgeon comme le téton d’une femme et repart. Est-ce ainsi chaque soir?

6 septembre- Oiseaux

En vautours tournoient les corneilles
Du bout des ailes noircissent le ciel
Des mouettes à becs affutés
Se disputent des restes de silence
De sa gueule ferraillée une péniche
Fend la Seine comme le froid les lèvres
Mais où est donc ma chouette?

2 septembre- Rentrée

Demain, c’est la rentrée. En quoi cela consiste ? Pour nous, adultes sans enfants, cela signifie des matins grisâtres, des artères parisiennes de nouveau engorgées, idem pour les bus et les métros, à nouveau ralentir devant les panneaux attention école et vers 16h30 prendre garde à toutes ces étranges personnes qui, munies d’un gâteau à la main, s’attroupent devant les établissements scolaires. On voit des papa en costars courir le matin un bambin dans la main ou une mère traverser une flaque (car il pleut toujours à la rentrée) en gazelle un cartable sur le dos.

Pour les enfants, c’est le stress et ils seront nombreux à dormir peu ce soir. Il y a le stress enthousiaste à l’idée de retrouver les copains, voire l'amoureux(se), de raconter ses vacances, de crâner avec le dernier gadget offert par les parents à l’occasion de cette rentrée. Le stress de savoir avec qui on sera ou pas en classe, quels profs ou instit on aura, l’emploi du temps, le cri unanime de protestation de la classe apprenant qu’elle aura cours le samedi. Tout cela sous les néons blancs des salles de classe aux vitres couvertes de buée. Cartable de 11 kilos, couvrir les livres, le prof de Maths veut un compas, le prof de Français un Bescherelle, la prof d’Histoire-Géo deux cahiers : un pour l’histoire et un pour la géo, elle insiste. Il y a ceux qui appréhendent davantage encore, parce qu’ils vont entrer à l’école, au collège ou au lycée. Et puis ceux pour lesquels l’idée des copains n’allège pas le retour vers une institution qu’ils détestent. Ils n’aiment pas l’école, n’aiment pas les profs ni l’emploi du temps quel qu’il soit : c’est le calvaire.

Dans les premiers jours, on fait des photos d’identités, on décore ses cahiers, son carnet de correspondance, dans les classes on choisit sa place, on achète les livres rasoirs du prof de Français. Mais viennent vite les premiers devoirs, les dissertations et les leçons, l’angoisse des contrôles et des notes, des conseils de classe, des cours où on ne comprend rien, des réunions parents-profs et des irrépressibles envies de dormir. Il faut ingurgiter, ne pas flancher, être bon partout, répéter, répéter, ânonner.
L’année va se dérouler comme pour le salarié, debout tôt tous les jours, emploi du temps réglé sans surprise autres que l'absence d'un prof; à 8h soyez concentrés, apprenez, répondez, ayez faim entre 12 et 13h, au-delà tant pis pour vous; les récrés, les permanences, les pions qu’on soudoie, le tout entrecoupé de vacances, d’anniversaires, de boums, de quelques rhumes et arrêts maladie.

Pour les parents, la rentrée est aussi moment de tension, reprise du rythme, conduire les enfants à l’école, les faire garder, acheter les fournitures, veiller à ce que les devoirs soient bien faits, à ce que les enfants racontent leurs journées pour guetter le moindre malaise ou écart d’éducation, lutter contre la télé, les coucher tôt. Il est des parents pour lesquels la rentrée est encore plus compliquée, ceux qui sont seuls ou pour lesquels acheter un livre est financièrement difficile et qui n’ont même pas pu faire partir leurs enfants en vacances.

Bref, la rentrée, c’est demain et pour plein de gens c’est un basculement : pas terrible, l’année tout entière et l’année de chacun est rythmée par le calendrier scolaire, mais enfin regardez avec attention et vous verrez que demain n’est pas semblable à aujourd’hui. D’ailleurs, pour l’occasion, l’horloge du Pont-Neuf qui marquait invariablement 3h43 depuis des mois a été remise à l’heure ce matin !